Une pratique

« Morte Nature », Musée de la Céramique Rouen, végétaux en porcelaine, alumine, 2004

Une pratique

L’expression de la fragilité est au cœur de ma pratique: fragilité de ce que nous sommes, de ce qui nous entoure et nous construit; fragilité de nos valeurs personnelles et sociétales;  fragilité de notre patrimoine naturel et culturel…

J’imagine des dispositifs convoquant des objets, des fragments d’objets déployés dans l’espace.

L’objet avec sa charge symbolique, tient une place particulière dans mon travail. Je joue avec ce symbole, je l’écorche, l’égratigne au profit d’une lecture plus énigmatique, singulière. L’objet m’intéresse quand il devient suggestif, dévoile une de ces particularités, un profil inattendu.

Je travaille principalement sur les niveaux de sens que portent les objets et les matériaux, du collectif au plus personnel. Ma pratique réside dans la création d’un chemin poétique entre le sens collectif, historique, politique ou encore culturel, social et un sens plus personnel, émotionnel, affectif que l’on porte à ces objets, ces matériaux. C’est dans ce chemin, à double sens, que tient l’essence de mon travail.

Je porte intérêt à l’origine et la circulation des matières premières et des objets à l’échelle du monde et j’établis souvent un parallèle entre la nécessité de protéger les espèces vivantes et notre patrimoine culturel, également menacé.

J’ai fait le choix d’une pratique artistique qui demande du temps.

Sous un calme apparent, mon travail se nourrit de tensions et de paradoxes. Ces tensions, plus ou moins perceptibles, provoquées soit par la violence des cuissons en céramique, soit  par le passage de l’état solide à l’état liquide d’autres matériaux, visent à utiliser la matière sous de nouvelles formes en la poussant parfois jusque dans ses derniers retranchements.

« S’accrocher », main en cire, photo 50 x 70 cm, Goldsmiths Studio, Londres, 2007

Le travail est alors pris dans un jeu paradoxal, entre force et fragilité, éphémère et éternel. L’objet mis à nu, ses caractéristiques s’effacent: la face cachée de l’objet devient perceptible, l’invisible s’humanise, se fragilise, l’objet est illusoire, il n’en reste parfois que la trace.

Si violence il y a dans certains des sujets abordés, dans le passage d’un état à un autre de la matière convoquée, le travail est terminé quand cette violence est apaisée. Pour autant, il ne s’agit pas de nier la perte, la disparition, ou bien, la déception ancrées dans ce travail.

Je joue souvent avec la notion de multiple dans mes installations. L’expérience de l’ensemble offre un voyage sensoriel, visuel et tactile, non plus du seul objet mais de tout l’espace ainsi habité.

 L’ensemble de ces dispositifs s’articule en 4 grandes familles: 

Le jardin des retours – In Between – Les états – In situ

« Les soucis », demi-jambes en biscuit de porcelaine, 2006